Je pourrais profiter de ce dimanche sans Gaëlle pour lire, écrire, sortir, mais je suis une loque : il me faut trois heures
pour m'extirper de ce lit confortable dans le creux duquel je visionne pour la trente-troisième fois de ma vie Starvin' Marvin in Space et Trapper Keeper ; deux heures pour prendre un bain bouillant ; une heure pour me traîner jusqu'à la Maison du Peuple où j'arrive — ô miracle ! — à me concentrer assez longtemps pour terminer un article, celui sur, entre autres, le radiotélescope Alma.
Concentré. — Talya, Poulain Perspicace et leur bébé Lilas s'installent à quelques tables de la mienne et sont assez vite rejoints par Andrew. Cependant, je ne les remarquerai qu'au moment où Léandra viendra, une heure plus tard environ, me révéler leur présence. « Tu avais l'air tellement concentré devant ton écran d'ordinateur quand nous sommes arrivés que nous n'avons pas voulu te déranger ! », me donneront-ils comme explication. Comme c'est chic de leur part !
Les « bobors ». — Léandra suit actuellement des cours à l'ICHEC mais elle n'y aime pas l'ambiance : la plupart des gens qui fréquentent cette école de gestion, professeurs comme étudiants, sont, d'après elle, des « bourgeois bornés ». Je croise le regard amusé d'Andrew... Nous avons, je pense, la même idée en même temps : ce ne sont plus des bobos mais des « bobors » ! Léandra continue son explication : « On a eu un cours consacré à Linkedin... Le prof n'a pas été jusqu'au fond des choses, il n'a fait qu'effleurer le sujet. Pour lui, Linkedin, c'est un réseau qui permet avant tout de "rester entre nous", entre cadres, entre gens du même monde, sans être dérangés par la plèbe ! Pfff... »
Restaurant philosophique. — Sur la route du « Vert de Gris » où nous allons manger ce soir dans le cadre des « RestoDays », j'explique à Léandra et Andrew mon nouveau concept de restaurant philosophique. Chaque mur serait une bibliothèque et chaque plat porterait le nom d'un philosophe : la salade Wittgenstein, les œufs Spinoza, le ragoût Schopenhauer, etc. Sur l'addition serait imprimée la phrase : « Sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence » et en guise d'au revoir, les serveurs lanceraient aux clients : « À jamais reviendriez-vous pour cette même et identique recette, pour à nouveau de toutes cuisines goûter le retour éternel ? »
Restaurant quantique. — Plus tard, lors du délicieux repas (cannelloni de homard et canette rôtie pour eux ; carpaccio aux copeaux de foie gras et filet de bar pour moi), nous discutons de cuisine moléculaire. — Il faudrait dépasser le stade de la molécule et s'aventurer jusqu'aux quantas ! Andrew imite le serveur d'un restaurant de cuisine quantique au sein duquel l'incertitude régnerait : « Désolé, Monsieur, vous ne pouvez pas connaître à la fois l'assaisonnement et la cuisson de votre viande ! » Ou bien la viande serait servie dans une boîte à chats de Schrödinger : tant que l'intérieur de la boîte n'aurait pas été observé, la viande se trouverait dans deux états superposés, à la fois crue et cuite.
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