vendredi 22 mars 2013

Si mon manteau connaissait mon plan...

En réunion à Bruxelles ce matin. Doëlle m'échange deux numéros de la série de BD Philémon, « Le Naufragé du "A" » et « Le Piano sauvage », contre Fredissimo, le meilleur de Fred (ou presque), un album retrouvé dans ma bibliothèque. — Solomon et Luc-Olivier peuvent oublier le format MARC 21 au profit du Dublin Core, et tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. — Deux consœurs historiennes/archivistes/documentalistes sont présentes, ainsi que ce cher Pieter, qui possède la particularité assez rare d'être à la fois historien et informaticien : après un renseignement pareil, allez encore me demander pourquoi je m'entends bien avec ce type !

Début d'après-midi à Namur. — À la sortie de l'école, Gaëlle me donne plus de détails sur cette histoire de reine Paola racontée hier au téléphone : « Il pleuvait et nous étions obligés de rester dehors pendant que les institutrices attendaient sous la tente. Je tremblais et je pleurais. C'est pour cette raison que la reine s'est avancée et m'a donné son bouquet de fleurs. » Un peu plus tard : « Il y avait une madame sous la tente qui nous regardait en riant alors que nous étions sous la pluie. J'avais envie de la tuer ! Ça ne se fait pas, tu ne trouves pas ? Ce n'était pas respectueux de rire sous une tente alors que nous, les enfants, nous attendions dans le froid. » — Ma fille a le sens de la justice (une bonne chose) mais elle parle une nouvelle fois comme dans The Village of the Damned.

Au café « Le Flandre », comme chaque vendredi ou presque (routine, routine), Gaëlle retrouve sa Nintendo 3DS. Le vieux monsieur de la dernière fois est à nouveau là. Il ne parle plus des « Dutroux et compagnie » mais tient un discours incohérent. Il me salue : « Bonjour Monsieur le Baron ! », me serre la main puis fait la bise à Gaëlle qui, étonnée, me demande si je le connais. « Nous nous sommes vus la dernière fois, vous vous souvenez ? me déclare-t-il.
— Oui, je m'en souviens très bien. Vous m'aviez parlé des bus qui klaxonnaient trop fort...
— Là, je dois y aller, mais la prochaine fois, on boira un verre ensemble !
— Ha bon ?
— Tic-tac ! Tic-tac ! Ah là là ! Moi je n'y connais rien à ces nouvelles technologies ! »

« Tout le monde m'offre des collations quand je suis dans la cour de récréation.
— Ha ?
— Oui... Surtout les garçons, si tu vois ce que je veux dire. »
(Ma fille est plus au courant que moi sur comment ça se passe.)

Sur le quai de la gare, en attendant le train, Gaëlle murmure quelques-unes des mélodies d'Ocarina of Time : la Berceuse de Zelda, le Chant de Saria, le Chant d'Epona, le Chant des Tempêtes, le Boléro du Feu, etc. Le train arrive. Avant d'y monter, un gars se tourne vers moi : « Excusez-moi... Votre fille est bien en train de chanter des musiques de Zelda, non ?
— Mais oui, tout à fait !
— Je suis un grand fan de Zelda !
— Eh bien, vous avez de très bons goûts !
— Mais comment connaît-elle Zelda aussi jeune ? »
La réponse « Il se fait que son père a lui aussi de très bons goûts » aurait fait belle impression, mais l'homme était déjà bien loin lorsque cette phrase m'a traversé l'esprit.

Dans le train bondé, je montre à Gaëlle le chiffre de Dorabella et lui explique en quoi consiste l'enjeu/le jeu : qu'il faut arriver à déchiffrer les symboles curvilignes qui équivalent sans doute chacun à une lettre. Ma fille me demande : « Peux-tu m'expliquer tes plans [sic] pour tenter de comprendre le message ? » Je lui résume donc le plus sérieusement du monde une partie de ce qui a déjà été entrepris (pas par moi spécialement) : la substitution de lettres, l'étude des points, l'analyse fréquentielle (expliquée de cette manière : « Si tu écris une phrase en français, est-ce que tu auras plus de "A" ou de "Z" ? ») et la question des roues éventuellement pivotantes. L'on pourrait croire que le plus drôle dans cette histoire réside dans le fait que Gaëlle me pose des questions très pertinentes, ou tente par elle-même de dessiner les roues que je viens de lui montrer, ou encore me sort des réflexions dignes d'une adulte (« Si je te donne des idées, Papa, si nous travaillons à deux, nous aurons de meilleurs résultats ! »), mais non : le plus drôle dans cette histoire, c'est le regard de plus en plus rond des deux adolescentes en face de nous. J'imagine presque leurs pensées : « Mais qui sont ces deux tarés ? » et ça me fait plaisir. Sans doute ma fille et moi avons joué une sorte de jeu de rôle, mais un jeu de rôle tellement crédible qu'il serait difficile, même pour nous, de le différencier de la réalité.

— Et puis, à la maison familiale en début de nuit, après que Gaëlle est partie au lit, ma mère m'apprend une des nouvelles les plus surréalistes de mon existence. —

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