lundi 25 juin 2012

17§

Être d'humeur triste et boire plus que de raison : un début de solution à mes problèmes d'écriture.

La mélancolie permet d'observer très précisément les bubons qui entachent la personnalité des autres. Mais elle donne par la même occasion un aperçu tout aussi saisissant de mes propres tumeurs.

Quand je suis mélancolique, je vois l'inanité de tout ce qui est entrepris, tant par les autres que par moi-même, et j'en suis triste. — Cette tristesse face à la vanité de toute entreprise constitue la seule opposition entre mes sursauts de mélancolie et mes fugaces instants de bonheur.

Autrement dit : quand je suis heureux, j'aperçois tout aussi bien l'inanité de l'existence, mais plutôt que de m'en démonter, j'en ris de bon cœur.

Sur le chemin du boulot, une étudiante marche devant moi. Son sac à dos volutes rouges sur fond rouge contraste avec son long manteau volutes grises sur fond gris. En la doublant, je m'aperçois qu'elle lit un roman... d'Agatha Christie !

Pour atteindre mon clavier d'ordinateur, je dois d'abord repousser le tas informe de livres, revues, feuilles volantes et post-it qui recouvre mon bureau. — Rien à faire : c'est dans ce pitoyable bordel que je suis le plus efficace. (L'exact inverse d'Hercule Poirot !)

Efficacité : un mot à bannir du monde du travail ! (Voire du monde tout court.) Seule compte la création, mais va dire pareille chose à un chef d'entreprise ! (Voire à un chef tout court.)

Wynka : « Le dernier courriel qu'il m'a envoyé me laisse penser qu'il est en dépression : il critique tout et se dit très déçu par nos comportements. » Je lui réponds : « Se complaire dans la tristesse et la critique de son environnement peut être une manière de vivre très satisfaisante. C'est l'occasion de se démarquer... » Et je conclus, tout souriant, par : « J'en sais d'ailleurs quelque chose. »

Je déboule dans la salle de lecture : « Alors, où se trouve-t-il, son texte ? » — Eh bien, il ne se trouve nulle part ! Elle n'a fait que compiler des informations et n'a encore rien écrit. Et moi, que fais-je avec ces données disparates ? (Tu devrais être content : paraît que t'aimes bien ça, les « données disparates »...)

Je commande une pizza à livrer à l'avenue Montesquieu. À l'autre bout du fil, la dame formule son éternelle question : « Vous pourriez m'épeler "Montesquieu" ? » « "Monte" comme "Monte" puis S-Q-U-I-E-U... C'est un philosophe français du XVIIIe siècle... L'auteur de De l'esprit des lois... » Gros silence puis : « Votre pizza arrivera dans une demi-heure environ ! »

« Certaines personnes écrivent mieux que d'autres. » Wynka : « Tout cela est subjectif. » Moi : « Non, ce n'est pas le moins du monde subjectif. Certaines personnes écrivent mieux que d'autres. »

Yama compare le football au scoutisme : tous rassemblés autour d'un totem, qu'ils défendent bec et ongles. C'est bien vu : unis dans le football/le scoutisme, mais différents par l'appartenance à une équipe/un totem...

« De mon côté, j'aurais plutôt tendance à comparer un match de foot à un concert de U2 » : même émotion commune de la foule, grands élans fédérateurs... Scouts, supporters et fans de U2 partagent indubitablement un air de famille.

Arcade Fire : je pourrais pondre un article entier sur ce groupe. Mais je pourrais tout aussi bien résumer mon opinion en deux mots : monstruosité criarde.

« Il ne t'apprendra rien, si ce n'est à penser autrement ! » — Et tout bien réfléchi, c'est le plus grand des apprentissages.

C'est solide, c'est noir, c'est mat et ça refuse presque toute évolution en termes de design et de forme. C'est un ThinkPad.

L'idée que je puisse continuer à écrire le présent journal à raison d'un article par jour jusqu'à ce que je meure (ou à tout le moins jusqu'à ce que j'en aie la possibilité intellectuelle et physique) exerce sur moi une certaine fascination — et une terrible angoisse aussi !

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