Il fait délicieusement bon pour un début de printemps. Vers 19 heures, Gaëlle et moi rejoignons Léandra et Andrew sur la terrasse nouvellement installée du Potemkine, dans l'ombre de la Porte de Hal. Les gérants du bar ont fait plus fort encore que l'année dernière : ce n'est plus une simple camionnette qu'ils ont installée à l'extérieur en guise de bar mais un véritable comptoir en forme de "L". La carte des boissons et des coupe-faims a été augmentée également. Pour inaugurer leur terrasse, ils ont convié le groupe de "Power Jazz New Orleans" Big Noise, dont il était déjà question précédemment dans ce blog, et ont installé un "petit écran géant" au-dessus de l'entrée de la tour. Jonas nous rejoint un peu plus tard dans la soirée.
Gaëlle veut jouer avec d'autres enfants sur la pelouse du parc qui jouxte la terrasse. Je la laisse faire mais cela entraîne un désagrément majeur : elle se trouve à une vingtaine de mètres de notre table et je ne peux m'empêcher de jeter constamment un œil sur elle. Il y a très peu de probabilités qu'elle soit confrontée à un quelconque problème, mais je ne peux néanmoins me détendre : je mets en balance sa relative sécurité dans le parc, entourée de badauds, et l'idée qu'elle disparaisse. Cette crainte est irrationnelle, je le sais, mais je me coupe d'une majeure partie de la conversation pour la surveiller. Lorsqu'elle disparaît dans l'angle de la tour, je me précipite pour lui dire de revenir dans mon champ de vision. À un moment, un homme commence à lui parler et Léandra se précipite elle aussi pour voir ce qu'il lui veut ("Un Italien qui la trouvait très belle"). Nous vivons dans la paranoïa... (Ou bien voulait-il réellement l'enlever ?)
La nuit tombée, Gaëlle joue en face de nous, sur la petite muraille à moitié détruite qui prolonge la Porte de Hal. Je suis beaucoup plus tranquille de la voir là, dans la cour intérieure, à quelques mètres de la table, et j'arrive à me détendre.
Après quelques verres d'horrible Volga — mais pourquoi m'obstiné-je à boire ce liquide encore plus insipide qu'une bière de soirée universitaire ? —, nous décidons de quitter la terrasse. Andrew ne tient plus l'alcool en ce moment et tombe de fatigue. Il reprend le métro pour rentrer chez lui. Je propose à Léandra et Jonas de venir manger un bout (une pizza Dr Oetker) chez moi. Gaëlle est contente d'avoir des invités. Elle essaie presque de convaincre Andrew de venir avec nous. Je la trouve mignonne — et très humaine, pour autant que ce terme ait un sens : évidemment qu'elle est "très humaine", vu qu'elle est humaine — lorsqu'elle se soucie à ce point des autres personnes.
Chez moi, nous ouvrons une bouteille de vin rouge et jouons au Trivial Pursuit. Entendu plusieurs fois : "Si Andrew était là, il donnerait sans aucun doute la bonne réponse directement..." Mais Andrew n'est pas là et, en outre, je crois ne pas me tromper en affirmant qu'il déteste ce genre de jeu.
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