Me plaindre du temps qu'il fait dehors ne sert à rien. C'est un peu comme si je me plaignais que le chêne perd ses feuilles en hiver : je n'ai aucune prise sur l'événement donc pourquoi me lamenter ? Le fait de me plaindre du temps, de la météo est quelque chose que je ne pratique qu'en société, et non pour moi-même : c'est une activité qui se déroule en compagnie d'autres humains qui acquiescent avec tristesse en lançant des « Eh oui ! » ou bien des « Pfff ! » de circonstance. Seul, il ne m'arriverait jamais de regarder par la fenêtre de mon appartement le soir et de soupirer en constatant que le ciel est couvert et qu'une ridicule petite bruine maussade tombe par intermittence sur la ville. Les conditions météorologiques n'ont aucune prise sur mon moral, mais lorsque je parle du temps avec des amis ou des collègues, il m'arrive pourtant parfois de lancer des phrases bateau comme : « C'est déprimant ! » — En Wallonie, un mot de trois lettres permet de décrire avec une assez bonne précision le temps qu'il fait en ce moment en Belgique : il fait cru. « Cru » est une belgicisme qui signifie à la fois froid et humide. Il fait cru lorsque, même emmitouflé dans un imperméable, l'humidité arrive à se frayer un chemin à l'intérieur des vêtements, jusqu'à la peau, et à donner au corps une sensation désagréable de froid mouillé. On entend parfois dire que les Inuits ont au moins douze mots différents pour décrire la neige, parce que cette dernière est de circonstance là où ils habitent, mais cette croyance est au mieux un beau raccourci sans trop de sens, au pire une information complètement fausse (voir ce lien ; le reste du site vaut la peine d'être lu ou, au moins, survolé). En Belgique, on pourrait croire, de la même manière, que nous avons de nombreux mots pour décrire le froid et l'humidité, mais il n'en est rien : nous avons seulement le mot « cru » en plus dans notre vocabulaire, et ce n'est déjà pas si mal. — Je sais à quoi me fait penser le ciel bruxellois depuis quelques jours : à l'album Astérix chez les Belges ! Dès que les trois Gaulois pénètrent dans la partie septentrionale de la Gaule, le ciel devient d'un gris uniforme et pesant, hommage à peine voilé de Goscinny et Uderzo au grand Jacques et à son ciel « si bas » et « si gris ».
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