Train de retour vers Bruxelles en compagnie de Yama. — Oui, j'irai certainement voir Ender's Game au cinéma à la fin de l'année, mais je serai forcément déçu. J'imagine presque déjà la musique grandiloquente et les batailles spatiales épiques, qui mettront de côté tout ce qui fait de ce court roman d'Orson Scott Card (1985) un chef-d'œuvre inspiré : les réflexions stratégiques du petit Andrew « Ender » Wiggin, mais aussi sa psychologie et son incapacité, du fait qu'il a été choisi depuis sa plus tendre enfance comme seul espoir de l'humanité face à la menace des Doryphores, de vivre la moindre parcelle de naïveté enfantine. (Il est, de par son génie, sacrifié sur l'autel de l'utilité militaire.) — Comment rendre compte de tout cela dans un film à grand spectacle sans sombrer dans le harrypotterisme ? Comment rendre à leur juste valeur ces longues séances d'entraînement dans l'environnement très confiné d'une école spatiale ? Comment, encore, restituer le personnage légendaire de Mazer Rackham, le sauveur de l'humanité lors de la seconde invasion, le seul à avoir découvert le talon d'Achille des envahisseurs extraterrestres, c'est-à-dire leur esprit de ruche ?... Je me dis que le seul événement facile à filmer dans cette histoire, somme toute, c'est la chute renversante : ce moment incroyable où, après des semaines de simulation de combats spatiaux de plus en plus corsés, le jeune Ender se rend compte que son entraînement n'en était pas un et qu'il a annihilé toute une civilisation consciente, à l'exception d'un seul œuf, qu'il se chargera de protéger. (Un jour, je me ferai lyncher pour ma manie consistant à bafouer systématiquement la sacro-sainte règle du spoiler.)
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