samedi 21 janvier 2012

Ernest le castor

Lire les premières pages de De la certitude de Wittgenstein avec Gaëlle qui regarde Bob l'éponge à la télévision dans le salon de mes parents et Mary qui m'envoie des messages pour connaître la taille de mes pulls n'est pas une affaire à prendre à la légère. C'est même quelque chose de quasiment impossible à réaliser. Si je pouvais décrire les pensées/phrases qui parcourent mon esprit à ce moment de la journée, ça donnerait approximativement :
« Qu'une proposition puisse être fausse après coup, cela dépend de Carlo ! Hé ! Carlo ! Mais reviens, qu'est-ce que tu fais ? Cela dépend de ce que j'accepte comme pouvant déterminer le sens de cette proposition. Hamil ! Tu mets quelle taille de pull ? Papa, tu as vu ce qu'il a fait, Bob ? Peut-on (comme Moore) énumérer ce que l'on sait ? Non, ce n'est pas possible ! Tu ne peux pas me faire un coup pareil, Carlo ! Comme ça, sans précision, je ne pense pas. Tu préfères un pull pour l'hiver ou pour l'été/le printemps ? Car si oui, l'expression "Je sais" est mal utilisée. Bob, s'il te plaît, Bob, lâche-moi, lâche-moi, lâche-moi ! À travers cette mauvaise utilisation, un état mental étrange et extrêmement important semble se révéler. Le printemps, c'est mieux, on sort et on drague plus ! Hihihi, pourquoi Bob, il s'accroche à Carlo comme ça ? Ma vie montre qu'il y a là une chaise, ou une porte, et ainsi de suite. Au travail, moussaillons, les pâtés de crabe n'attendent pas ! »
J'abandonne... Je pose le livre sur la table du salon et je regarde ce pauvre mais néanmoins horripilant Bob l'éponge qui tente coûte que coûte de se réconcilier avec son "ami" Carlo.

L'après-midi, ma fille regarde Fantasia, le vieux (1940) long-métrage d'animation de Walt Disney. Quand j'étais petit, je vouais une admiration sans borne à ce dessin animé. Il faisait partie de ma "tétralogie Disney", avec Taram et le Chaudron magique, Merlin l'enchanteur et Alice au pays des merveilles. Hélas ! C'est un peu comme pour le film L'Histoire sans fin, que j'ai visionné avec Gaëlle il y a deux semaines : je vois désormais tout cela avec des yeux d'adulte et je trouve les animations vieillies et le style un peu pompeux. C'est très bien animé mais le poids des ans s'est déposé sur ce chef-d'œuvre. Je me souviens que petit, j'adorais la Danse de la fée Dragée (tirée de Casse-Noisette de Tchaïkovski) et la scène finale du Mont Chauve (Une nuit sur le mont Chauve de Moussorgski). Aujourd'hui, j'apprécie toujours beaucoup la scène de la fée Dragée et j'admire le final expressionniste, mais le reste m'a prodigieusement ennuyé, pour tout dire...



Plus tard, Gaëlle, ma maman et moi jouons à "Labyrinthe", un vieux (1986) jeu de société Ravensburger dont l'objectif est d'atteindre une liste d'objets sur un plateau constitué de cases mouvantes. Lorsque je me mets à table, Gaëlle commence à pleurnicher : "Noooon, je ne veux pas que Papa joue avec nous ! Il va encore gagner !". Ben ça fait plaisir, tiens... Alors que je suis effectivement en train de gagner, forcément – contre ma mère et un petit enfant, la tâche n'est pas compliquée –, Gaëlle lance : "On va faire comme si Papa n'existait pas. Il peut jouer, mais on ne le regarde pas. Et s'il gagne, ça ne compte pas !" Ben voyons...

Pour endormir Gaëlle, le soir, je lui raconte une histoire de vache qui en a marre de brouter de l'herbe dans sa plate prairie et qui rêve de partir s'installer dans les montagnes qu'elle observe, au loin, à l'horizon. Sur le chemin, elle croise des amis, qui en croisent d'autres, qui en croisent d'autres à nouveau, etc., à tel point que lorsque la vache arrive dans un beau vallon, elle est accompagnée de 18.000 autres animaux (dont Ernest le castor, son meilleur ami). Elle a envie d'être seule, alors elle décide à contre-cœur de retourner dans sa prairie d'origine. Cependant, au milieu de la montagne, elle rencontre un yéti qui broie du noir dans sa caverne isolée. Le yéti est du genre "gentleman britannique" : il l'accueille avec de grands cris sauvages ("Yahaaaaargh !") mais dès que la vache se présente, il lui propose du thé, avec un soupçon de lait, en prenant l'accent d'un dandy. La vache tombe amoureuse de lui et décide de s'installer dans sa caverne... Et ils se marièrent et eurent beaucoup de yétis-veaux (oui, oui...). Comment ça, elle ne tient pas la route, mon histoire ?

Quel est le rapport avec Orson Welles, qui était censé hanter mes journées depuis la fin décembre ? Aucun. Je n'ai aucune suite dans les idées : je veux commencer trop de choses en même temps : regarder Citizen Kane, Le Procès et La Dame de Shanghai sans l'aide de feu Megaupload, lire tout Wittgenstein, me plonger dans l'humanisme pessimiste de von Wright, découvrir l'histoire des codes secrets et lire des ouvrages sur la civilisation minoenne (c'est nouveau ça, Hamilton ? Oui, c'est nouveau !), sans compter les autres livres que l'on m'a offerts à mon anniversaire... Du coup, je me noie dans mes "projets" et n'achève jamais rien. C'est très énervant qu'il n'y ait que si peu d'heures dans une journée, et si peu de journées dans une vie... Et qu'en plus il faille dormir !

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