La prévision météorologique de ce vendredi : prévoyez pulls et gros manteaux si vous comptez sortir car la bise soufflera et vous glacera les os.La réalité : je suis en tee-shirt et Gaëlle est obligée d'enlever son pull car elle a "beaucoup trop chaud".
Gaëlle joue à l'extérieur de la maison familiale durant la majeure partie de l'après-midi : trottinette, balançoire, toboggan, freesbee, ainsi que d'autres jeux plus tordus, comme celui consistant à lui faire faire des figures de gymnastique en lui criant : "une, deux-zé deux", "une, deux-zé trois" ou "une, deux-zé quatre". Si j'oublie la liaison entre le "deux" et le "et", Gaëlle fait une crise de nerfs. Si je choisis "deux", elle fait un cumulet ; "trois", un poirier ; "quatre", une roue. Si je choisis un autre chiffre que ces trois-là, elle n'est pas contente.
Je me dis que Gaëlle a sans doute dû apprendre ces exercices durant un cours de gymnastique à l'école. Cependant, elle me dit que "non, non, pas du tout, c'est moi qui les ai inventés." Elle réussit moyennement bien la roue et, lorsqu'elle tente un poirier, elle retombe une fois sur deux à l'envers, la nuque et le dos en premiers, ce qui fait peur à ma tante et stresserait terriblement ma mère si elle voyait la manœuvre. "Si elle retombait mal, elle pourrait se briser le cou..." Oui, et si je ratais une marche dans l'escalier, je pourrais me retrouver tétraplégique du jour au lendemain. — Et si, et si...
Mon cousin Fridric et son fils Roberto débarquent. Gaëlle s'amuse avec Roberto, plus jeune mais presque aussi grand qu'elle. Elle veut tout diriger et joue constamment dans un esprit de compétition. Roberto est à l'opposé de ce comportement : il s'en fout complètement de gagner et se fiche de diriger ou d'être dirigé. Il ne comprend pas Gaëlle. Quand il en a marre, il s'en va, tout simplement, comme si de rien n'était. Alors, c'est le schéma classique : Gaëlle commence à pleurnicher voire à se rouler par terre, telle une incomprise, parce que ça ne se passe pas comme elle veut ; parce qu'il ne fait pas ce qu'elle lui ordonne de faire ou parce qu'il "triche". Gaëlle aime contrôler la situation, est mauvaise perdante et de mauvaise foi.
« Tiens, je me demande à qui elle ressemble, lâche ma mère.
— Ha ? À qui penses-tu ?
— À toi, tiens, Hamilton ! Tu ne te souviens pas de toi enfant ?
— J'aimais avoir le dernier mot, hein ?
— Et tu avais une cour autour de toi, aussi, tu t'en rappelles ?
— Oui, mais ma cour à moi suivait mes directives sans broncher. »
(Gnagnagna : on dirait un petit enfant... — Je n'en suis sans doute pas si loin, cela dit.)
Les événements auxquels ma mère fait référence se sont surtout déroulés lorsque j'étais en primaire, période durant laquelle j'étais inconditionnellement considéré comme un leader par mes camarades. En deuxième primaire, par exemple, j'avais décidé de construire un jeu de marelle géant (une centaine de cases) recouvrant une grande partie de la cour de récréation. Après avoir reçu l'aval de mon institutrice (Madame Charlier), j'étais devenu le maître d'œuvre d'un gigantesque dessin numéroté à la craie. Je prenais part à sa réalisation, mais j'avais surtout réussi à convaincre une dizaine d'enfants de travailler pour moi. Certaines institutrices se sont amusées à tester le jeu, une fois terminé.
Deux-trois ans plus tard, en quatrième ou en cinquième année donc, j'étais dans mon trip "militaire" : j'avais créé une hiérarchie stricte au sein d'un groupe de potes, hiérarchie dont j'étais le chef incontesté. J'avais même fabriqué, avec l'aide de mes parents (!), des cartes dactylographiées et plastifiées qui reprenaient les nom, prénom et grade de chacun de mes subordonnés, du général (mon meilleur ami) aux sergents. Les grades reprenaient à peu de choses près la hiérarchie du Stratego. Souvenir : les filles observaient ces simagrées d'un œil assez froid. Un jour, l'une d'elle (Anne-Laure), me voyant passer devant elle suivi de mon "défilé de gradés", lança une phrase marquante : "Tiens, voilà encore Hamilton qui se la pète avec son armée !"
(Toutes ces histoires étaient jusqu'à aujourd'hui presque entièrement enfouies dans ma mémoire, et les ressortir me fait vraiment plaisir. — Mais où est la vérité et où sont les exagérations ?)
(Toutes ces histoires étaient jusqu'à aujourd'hui presque entièrement enfouies dans ma mémoire, et les ressortir me fait vraiment plaisir. — Mais où est la vérité et où sont les exagérations ?)
Arrivé en secondaire, mon leadership s'est effondré d'un seul coup et je suis devenu irrémédiablement, surtout à partir de la troisième, l'archétype de l'intello boutonneux replié sur lui-même.
* * *
Au pied du lit de Gaëlle : l'histoire d'un petit garçon qui parle tellement vite que personne ne le comprend. Par exemple, lorsqu'il demande du lait, il dit très rapidement : "skejpavoirdlai?"... Ses parents se rendent compte qu'il a un problème, alors ils l'emmènent chez une logopède, qui arrive à corriger son élocution, mais beaucoup trop. Ainsi, après dix séances chez la spécialiste, le gamin parle beaucoup trop lentement : il lui faut presque une heure pour demander du lait. Alors il retourne de nouveau chez la logopède qui ajuste son débit de parole. Après cinq séances, le petit garçon parle désormais normalement, mais garde néanmoins quelques reliquats de ses anciens modes d'expression : parfois, il s'emballe et on ne le comprend plus ou, au contraire, il prononce des parties de phrase très lentement... Mais dans l'ensemble, tout est ordre et tout est bien qui finit bien.
La deuxième histoire est une variation sur le même thème : le récit d'un enfant qui se déplace très lentement, etc.
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