« Nous autres, Ami,
Mangeons au râtelier du progrès !
Nous brûlons les relais !
Nous ne nous arrêtons jamais dans les gîtes d'étape ! —
Vois-tu cette vieille masure recouverte de lierre ?
Demain, elle n'existera plus !
Nous la dynamiterons
Comme nous avons dynamité toutes les autres avant elle. —
L'ancienne pensée est moribonde.
Adieu Emmanuel ! Adieu Friedrich ! Adieu Ludwig !
Sur les ruines de l'ancien monde,
Nous en bâtirons un nouveau. —
Tu n'y auras pas ta place.
(Et c'est tant mieux.)
J'ai gardé pour toi, Ami,
Une belle cellule
Dont les contours sont si spartiates
Que les briques rêches empêcheront ton sang de couler. —
Imaginée par nos meilleurs techniciens,
Elle sera à l'image d'une vision
Où l'espace n'a pas lieu d'être,
Du moins pour des gens comme toi. —
Tu n'existes pas.
Tu n'as jamais existé.
Et tu n'existeras jamais.
Pour nous, tu es déjà mort. —
Tu n'es pas le bienvenu ici.
(Et je ne donne pas cher de ta peau.)
Vois-tu, Ami,
Ces incendies périphériques ?
Ces remparts qui s'écroulent ?
Ces humains qui tombent sous nos balles ? —
Tes libertaires de pacotille,
Tes gauchistes dépassés,
Nous n'en ferons qu'une bouchée.
D'ailleurs, nous les avons déjà dévorés ! —
Ils gisent, sans doute morts
Mais peut-être encore vivants, qui sait ?
Sur les champs idéologiques
Que nous avons nous-mêmes semés. —
Nous gagnons de l'argent.
(Et c'est tout ce qui compte.)
Je voulais te dire, Ami,
À quel point je te hais !
Mais ta vie, je la pardonne
Car nous la contrôlons. —
Nous écraserons vos os
Jusqu'à l'élimination complète de votre engeance,
Et sur vos restes fumants,
Nous entamerons une danse ! —
Nous broierons vos cœurs
À l'aide d'un moulineur high-tech,
Dont les lames de titane
Seront colorées par vos tripes ! —
Je boirai ton sang.
(Et je m'en régalerai.)
Regarde, Ami,
Comme ce téléphone est joli !
J'en avais réservé un pour toi,
Mais tu l'as refusé par mépris. —
Vois comme cette émission est belle !
Écoute comme la vérité
Coule des bouches de ciment
Que nous avons nous-mêmes modelées ! —
Je sais que tu n'y crois pas,
Mais tu ne comptes pas.
Tu n'as jamais compté.
Et tu ne compteras jamais. —
Je te regarderai brûler.
(Et l'odeur âcre de ta peau incinérée alimentera mon bonheur, pour l'éternité !) »
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